jeudi, 28 juin 2012 11:13

Anodine, la réforme des rythmes scolaires?

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 Le titre d’un article de Roger Célestin publié le 18 juin 2012 sur le site « Atlantico » nous fait nous interroger : « …Pourquoi Vincent Peillon a raison (… ?) de vouloir réformer les rythmes scolaires ? ». Nous sommes surpris de ce parti pris en faveur de cette réforme. Qu'y a-t-il donc derrière cette volonté de réformer les rythmes scolaires et pourquoi devrait-on être amené à considérer que le Ministre a forcément "raison" telle que la formulation le laisse supposer ? 

 

…Un train peut en cacher un autre…  

...Derrière cette modification – en apparence anodine - des rythmes scolaires consistant, dans un premier temps, à vouloir allonger un  peu le temps scolaire d’un côté, le diminuer un peu de l’autre, saupoudrer quelques changements qui fassent se perdre en considérations pratiques sur les gardes d’enfants, les week-ends, les vacances... qui puissent occuper l’esprit du public et « noyer le poisson » des véritables enjeus, se profile en réalité, une révolution complète de l’Ecole du primaire à l’université incluse, révolution nommément désignée du terme de « refondation » dans laquelle  cette modification des rythmes scolaires ne représente qu’un des corollaires et doit s’opérer par petites touches.

C’est ainsi qu’il est souligné très justement que « ...l’allongement des vacances de la Toussaint n’est qu’une pierre dans la recomposition du calendrier scolaire annuel... », ce qui tend  bien à confirmer …qu’ « un train en cache un autre » et que cet allongement des vacances de Toussaint ne  constitue que le préalable à des changements plus profonds !

En effet ! poursuivant ainsi : «…au global, avoir davantage de temps scolaire permet d’alléger le temps d’enseignement quotidien (…)  au profit des devoirs qui seraient 100% faits à l’école, du soutien et des autres activités …» ; en d’autres termes, plus l’élève passerait de temps à l’école, plus cela permettrait de réduire les cours (…) au profit des « devoirs,  soutien et autres activités » ! C’est original ! quant à nous, nous aurions plutôt été tentés de penser le contraire,  mais cette affirmation trahit les véritables intentions des réformateurs et de la caution que leur apporte l’auteur de cet article !

C’est bien ce qui va se produire, en effet !   et si l’inversion du raisonnement telle qu’elle est présentée ici à de quoi surprendre, elle ne nous étonne pas outre mesure puisqu’elle correspond à l’objectif de supprimer progressivement tous les cours dans le cadre de la « refondation » du système éducatif, en présentant les changements qui en résultent comme des dispositions visant, au contraire, à améliorer l’efficacité dans le travail  pour tous les enfants dans le prolongement des cours alors que les prétendus devoirs sont amenés à se faire progressivement  en remplacement de tous les cours ; c’est ainsi qu’en prétendant intégrer les « devoirs » dans le temps scolaire, le temps d’enseignement va pouvoir  allégé, non seulement parce que les parents n’en sauront rien du fait qu'ils n'auront plus rien à superviser –mais en leur faisant croire l’inverse ! car il est bien évident que, non seulement  ils n’apporteraient  pas leur caution à cette révolution scolaire dont ils sont dupes et de laquelle ils sont ainsi mis à l’écart, mais ils la rejetteraient .

C’est ainsi que sous couvert de « devoirs » et de « soutien », il s’agira de faire réaliser des activités choisies  par les enfants au cours desquelles ils seront censés construire leur savoir… en remplacement des cours et ce, du primaire à l'université incluse! et c'est aussi ce qui justifie que toutes ces activités ne peuvent se faire qu'"intra-muros"! 

Ce qui explique aussi que les « enseignants », désormais reconvertis en accompagnateurs de projets d’élèves, passeront tout le temps de travail à l’école puisqu’il n’y aura pas plus de cours à préparer que de copies à corriger, et c’est ce que l’auteur de l’article appelle plus loin « enseigner différemment » :  le journaliste a donc bien compris ce qui se profile derrière cette modification des rythmes en apparence, sans grande importance.

La réalité de la réforme des rythmes scolaires

Tout ceci est corroboré par la suite du discours : « … le sujet des rythmes est un levier pour engager la transformation du fonctionnement du système scolaire…les mesures envisagées par Vincent Peillon suivent les recommandations d’un rapport de juillet 2011 produit par un Comité de pilotage sur la réforme des rythmes scolaires, piloté par Christian Forestier (un de nos « brillants » pédagomanes !) remis au ministre de l’Education Nationale Luc Chatel... »

On ne peut mieux dire ! Vincent Peillon n’invente rien, il poursuit la « refondation-destruction » du système éducatif engagée par ses prédécesseurs.

…Puis, plus loin, «...allonger et améliorer le temps scolaire ne peut qu’améliorer les résultats des élèves en difficulté, faciliter le travail de soutien mené par les enseignants et surtout, favoriser la réforme globale du fonctionnement du système scolaire qui passe par une manière différente d’enseigner… »

La formulation est habile. En premier lieu, il est mis en avant le fait qu’ « allonger …le temps scolaire ne peut qu’améliorer les résultats… », ce qui, théoriquement est le but recherché, mais il est ajouté tout de suite après et en « mineur » comme autre but "surtout favoriser la réforme globale du fonctionnement du système scolaire, qui passe par une manière différente d’enseigner…" , la manière différente d’enseigner, étant celle de ne plus enseigner du tout et de n’être que de simples accompagnateurs de projets d’élèves ! ce que l’histoire ne dit pas, bien entendu !

Alors, Vincent Peillon a-t-il « raison » de réformer les rythmes scolaires?

S’il cautionne la « refondation-destruction » du système scolaire - et c'est le cas - on peut estimer qu’il ne peut pas faire autrement puisque cette réforme des rythmes scolaires en est le corollaire et , dans cette logique, il a « raison », mais a-t-il « raison » de cautionner la « refondation-destruction » du système scolaire ? c’est une autre histoire !

En tout état de cause, voilà un journaliste complaisant avec le ministre  et  avec la "refondation-destruction" de l'école.! 

Lu 12029 fois Dernière modification le samedi, 26 janvier 2013 13:54